[cedar] Scan:-(

  • From: Rouffineau <rouffineau@xxxxxxxxxx>
  • To: CEDAR <cedar@xxxxxxxxxxxxx>
  • Date: Thu, 28 Mar 2002 11:08:53 +0100

En réponse à mon soutien au Scan, je voudrais proposer quelques
interrogations, des modulations aux propos de Douglas et un point de vue
au Cedar.

Les tensions diffuses, vaguement perceptibles en septembre contre vos
projets à la Villa Arson ne sont pas nommés très précisément, ils
laissent place à des interprétations assez ouvertes. Je les interprète
avec mes repères, et mon expérience de l'option design graphique à
Valence ou nous tentons de considérer la place du numérique dans un DNAT
(autre challenge).

Indépendamment du style, bien supérieur à mon propre anglais, je trouve,
Douglas, que ton approche est un tout petit peu schématique  avec la
mise en abîme des 2 oppositions, à l'art contemporain et aux nouvelles
techno. Même si je pense que la communauté de bêtise qui peut réunit ces
résistances me va assez bien.


1/ L'art contemporain, le risque du Label.

Tu fais écho aux querelles récentes qui menacent la légitimité à priori
de "l'-art-contemporain". Je ne pense pas que la position défensive soit
finalement autre chose que la résistance limite à la bêtise que tu
décris et qui existe.
Mais je propose de la  réserver aux cas extrêmes : autodafé?
autoritarisme, censure, auto-censure (ça se complique) .
Le niveau d'analyse doit être à mon sens déplacé pour éviter les
simplifications.
Considéré en bloc, avec ses forces de légitimations internes, ses
complaisances possibles, un usage de réseau qui peut être abusif, et les
difficultés d'une critique indépendante, l'effet de "milieu" peut tendre
à en nier les enjeux essentiels : ouvrir sur un monde pour questionner
le notre.

Des critères de cohérence interne, de pertinence, d'économie de moyen,
peuvent amener à dire cette ?uvre est faible, telle autre est forte.
L'approche globalisante ( le risque du Label ) en affaiblit la portée.
Seule la question de l'évaluation qualitative, la force interne à
l'?uvre, sa dimension critique nous concerne : en bref plus d'exigence
que de défensive.

Le Label c'est quelque chose que l'on accueille "les yeux fermés", une
garantie de retrouver un air de famille. Je pense que nous sommes plutôt
d'accord pour faire en sorte que les étudiants aient les yeux un peu
plus ouverts après leurs passage en école d'art.
Donc résolument pour la création d'aujourd'hui, vivante, risquée,
singulière, non défensive, non unitaire.
La querelle sur "l'-art-contemporain" n'a pas toujours évité ces écueils
simplificateurs : « à prendre ou à laisser!! ». Tentons une alternative,
peut-être le numérique en fournit-il l'occasion?


2/ L'art technologique, les enjeux stratégiques.

Les nouveaux outils se présentent toujours menaçants. Figures de
l'inconnu, nécessitant l'apprentissage au sens fort : une nouvelle
appropriation du monde demande du temps, suppose efforts et remises en
cause : sorte d'acclimatation ?
Rien de naturel dans l'innovation technique, il faut savoir y lire une
violence. Nous savons d'ou viennent ces machines à calcul, leurs enjeux
stratégiques, toute méfiance n'est pas déplacée.
La reconfiguration que propose le numérique mérite probablement une
attention elle aussi plus fine que l'opposition que suggère la coupure
(techno) phile/phobe. Cette attention je l'ai trouvée dans les
questionnements CEDAR/SCAN c'est tout le crédit qui me porte à soutenir
votre travail à la Villa. Nous avons tous à y gagner dans les échanges à
venir. Même si l'échelle des moyens nous porte à la modestie.

Nous sommes pour la plupart des générations de transition. Sauf
exception, ( Stanley, et si j'en oublie, excusez moi  ) peu nombreux à
être « tombé dedans » quand nous étions petits, et cet effort de
déplacement des perceptions, des modes sensibles et conceptuels ne peut
être minimisé.
Mais cela va très vite, et des étudiants sortent avec une culture plus
profondément ancrées sur ces usages et ces questions de
légitimation/disqualification ne vont pas faire long feu. (trop
optimiste?, pas sûr)
Certains, pour qui ces questions seront absolument datées, vont bientôt
enseigner et ou diriger .

Je pense qu'il faut, quand à ces outils,  éviter de reproduire les
erreurs de la position pictorialiste.
Au début du siècle la question lancinante de ce groupe nostalgique était
de tenter de mesurer en quoi la photographie pouvait être un art.
Position aveuglante du rôle que cette image déjà ancienne , mais alors
en cours de plus large diffusion, opérait déjà sur le paradigme d'art
lui-même. Les échos complexes, non chargés d'ambiguïté, de la
disparition de l'aura, en seraient la formulation la plus vive.

Donc aujourd'hui c'est l'objet même qui se redéfinit, pas si simple. Je
pense que pour fragiles que soient ces transpositions historiques, nos
collègues, et décideurs les plus "phobiques" n'y résisteront pas
longtemps. Le numérique et ses usages, y compris sociaux et
fonctionnels, (option design oblige) redéfinit et relativise nos
jugements. Ne pas prendre en compte cette donnée dans nos lieux
d'enseignement relève simplement d'un même aveuglement stupide. Voici en
quoi ces questions semblent aujourd'hui stratégiques donc forcément
source de tension.

Tenez bon.

A+
Gilles Rouffineau



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