[OLplus] /TACTIQUE/Les leçons tactiques de Juventus-Lyon (So Foot)

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  • Date: Sat, 8 Aug 2020 10:14:17 +0200 (CEST)

Les leçons tactiques de Juventus-Lyon

Alors que l'Europe avait les yeux tournés vers Manchester, la France a vu 
l'Olympique Lyonnais écrire une page d'histoire et devenir le premier club 
français vainqueur d'une double confrontation face à la Juventus. S'il est 
tentant de résumer l'exploit des hommes de Rudi Garcia à la réussite du plan 
défensif du technicien français, cela serait réducteur : l'OL, battu à Turin 
(2-1) mais qualifié, aura surtout réussi à tenir en poussant la Vieille Dame 
sur ses points faibles et aura vécu une nuit en tuant les grandes vagues 
attendues.
Par Maxime Brigand

Filtre dans le bec, Maurizio Sarri sautille. On ne joue que depuis quelques 
secondes et le sexagénaire, qui avait demandé lors de l'apéro médiatique à ses 
joueurs d'être « lucide et froid » , assiste à ce qu'il pense être une 
déclaration d'intention : le premier mouvement turinois du soir. Sur un 
dégagement de Szczesny, Maxwel Cornet dévie maladroitement de la tête entre 
deux – Marçal et Marcelo - des trois centraux lyonnais, zone où Gonzalo Higuain 
vient fourrer son nez avant de remettre en retrait vers Bernardeschi. À cet 
instant, l'OL se fissure et Bentancur est trouvé au cœur du milieu à trois 
têtes de Garcia (Aouar, Guimaraes, Caqueret), endroit d'où l'Uruguayen va faire 
pivoter le jeu vers la gauche. Dubois sorti sur Ronaldo, Caqueret dépassé sur 
la séquence et alors que Denayer décide de défendre en reculant, Rabiot peut 
chercher Higuain à l'entrée de la surface. Peur d'entrée sur l'OL, mais Marçal 
intervient parfaitement et contre la repri
 se de son grassouillet vis-à-vis. Anthony Lopes ne panique pas : ce décalage 
va être l'un des seuls réussis d'une première période où un piège s'apprête à 
se refermer sur le bec de la Juventus. Un piège étiquetté ainsi par Rudi Garcia 
90 minutes plus tard : « Il s'agit de ma défaite la plus belle en Ligue des 
champions. » La plus belle, vraiment ? Il y a de ça, oui, sachant qu'au cours 
de sa carrière, le Patrick Swayze de Nemours est souvent ressorti des grands 
cols avec les jambes sciées et la langue pendue. Alors qu'on pouvait s'attendre 
à voir son OL souffrir sous les vagues turinoises, Garcia a réussi à poser sur 
la table du champion d'Italie un bloc compact, courageux, mais aussi joueur, 
avec ses défauts mais aussi de belles qualités. S'il est tentant de simplifier 
la réussite du plan lyonnais à la physionomie de la rencontre, Memphis Depay 
ouvrant le score avec une panenka couillue après douze minutes de jeu, ce qui a 
alors forcé la Juventus à 
 planter trois fois pour voir Lisbonne, ce serait ici trop simple. Bien trop 
simple. Car à Turin, Lyon ne s'est pas contenté de marquer et de fermer la 
boutique avant de se pavaner avec la première élimination de la Juve sur un 
aller-retour obtenue par un club français. Au contraire, l'OL a débarqué en 
Italie avec un plan précis et a poussé la Vieille Dame dans ses propres 
failles. Un plan découpable en trois parties : pose du piège, réaction de la 
victime et gestion intelligence des derniers souffles de l'adversaire.

La pose du piège

À l'aller, fin février, Rudi Garcia avait décidé de ne pas attendre la Juve et 
de la regarder dans les yeux. Cinq mois plus tard, le coach lyonnais a 
renouvelé cette demande auprès de ses hommes, avec quelques petits ajustements, 
mais en conservant l'idée qu'une qualification s'obtiendrait avec un pressing 
généreux et malicieusement coordonné sur plusieurs étages. Comme face au PSG en 
finale de la Coupe de la Ligue, l'OL a notamment été capable de rapidement 
boucher les espaces d'entrée, avec un bloc assez haut tout en subissant moins 
les prises de balle des ailiers adverses (Bernardeschi et Ronaldo) que face aux 
décrochages de Neymar et Di Maria. Constat froid et rapidement visible : cette 
Juve a été moins bien armée que le PSG pour gêner offensivement l'Olympique 
Lyonnais et a eu moins de menaces que les Parisiens à l'intérieur du jeu, 
Bernardeschi et Cristiano Ronaldo n'étant pas aussi dangereux que Neymar et Di 
Maria lorsqu'ils sont posés à 35-40m du but a
 dversaire et les relayeurs turinois (Rabiot et Bentancur) ayant des profils 
qui posent problèmes sur plusieurs séquences.



Comme à l'aller, la structure défensive de lyonnaise a rapidement été 
identifiable avec comme premier objectif de couper l'alimentation de Miralem 
Pjanic, seul garant de la créativité du milieu turinois, grâce au duo 
d'attaquants de Garcia, Memphis Depay et Karl Toko-Ekambi. À Turin, Toko-Ekambi 
a été la seule demi-surprise du onze lyonnais et sa présence s'explique 
facilement par la volonté de l'OL de jouer les transitions et les contres mais 
aussi de mettre plus de pression qu'avec Dembélé sur une paire De Ligt-Bonucci 
fébrile. À la 9e minute, ce choix s'est d'ailleurs justifié par les faits 
lorsque Depay a été à l'entrée du dernier tiers turinois sur une déviation de 
Cornet, qu'il a bougé de Ligt à l'épaule et a ensuite vu Toko-Ekambi profiter 
de ce duel gagné pour percuter. Derrière : projection de Caqueret sous le nez 
d'Alex Sandro, ballon mal renvoyé de la tête et Aouar a alors fait monter le 
premier frisson de la nuit le long du cou de Szczesny. Mi
 eux, cette première secousse a été suivie une trentaine de secondes plus tard 
par un ballon parfaitement mordu par Marcelo sur les côtelettes d'Higuain, bien 
exploité par Caqueret et qui a débouché sur un penalty gratté par Aouar dans 
les pattes de Bernardeschi. Pas mal de l'OL conquérant est sur cette séquence : 
pressing haut qui permet de casser la sortie de balle adverse, facilité à jouer 
entre les lignes et capacité à se jouer de l'adversaire grâce à des dribbleurs 
nés.

La Grande Vague d'Hokusai n'est pas tombée sur les yeux de l'OL

Aux manettes, l'OL a alors pu mettre en place son piège autour de la Juve en 
faisant varier la hauteur de son bloc par rapport à la finale de la Coupe de la 
Ligue. Cette fois, Denayer et Marçal ne sont pas sortis aussi haut sur les 
ailiers adverses et une ligne de cinq têtes s'est clairement mise en place. 
Triple objectif : protéger la profondeur, fermer l'intérieur - où l'OL était en 
supériorité numérique (3v2) - et pousser la Juve à passer sur les côtés, donc à 
multiplier les centres. Si l'OL a joué plus bas que face au PSG et qu'il a un 
peu plus subi, il n'a en aucun cas vu la Grande Vague d'Hokusai lui tomber sur 
les yeux. Au contraire : au cours de la partie, la Vieille Dame a tenté 39 
centres et n'en a réussi que 8. Ce qui a confirmé deux choses : d'abord, que 
l'OL possède avec Marcelo et Denayer (6 ballons renvoyés chacun) deux types 
capables de renvoyer efficacement les centres adverses ; ensuite, que cette 
Juventus, ce qui est triste à constater lorsqu'
 on se souvient du Naples de Sarri, est systématiquement sans solution 
lorsqu'elle affronte un bloc bas, car incapable de changer de rythme. Sans 
Dybala, c'est alors le grand vide et Bernardeschi, posé côté droit, est un 
homme mystérieux, au registre hyper limité et dont l'apport au jeu est de la 
poussière (cette saison, il n'a délivré que trois passes décisives et n'a 
inscrit que deux buts toutes compétitions confondues). Néanmoins, c'est lui, 
individuellement car hors des coups de pied arrêtés la Vieille Dame n'a su 
avancer qu'ainsi, qui n'est pas passé loin de remettre la Juve sur les rails en 
s'offrant un slalom hirscherien côté droit, finalement sauvé par Marcelo.



Pour le reste, où on a-t-on vu le gang de Sarri ? Quasiment nulle part, si ce 
n'est sur quelques ballons touchés dans les airs par Ronaldo (20e) ou Higuain 
(37e), et sur un coup franc du portugais boxé par Lopes (40e). Dans le jeu, la 
Juve a rendu un nouveau brouillon, Pjanic étant bien contrôlé par les 
attaquants lyonnais et s'attachant surtout à bien contrôler la poupée folle de 
l'aller (Guimaraes) là où Rabiot et Bentancur n'ont jamais su profiter des 
espaces laissés dans les dos d'Aouar et Caqueret pendant qu'Alex Sandro et 
Cuadrado n'ont rien apporté. Symbole de l'impuissance de la troupe : l'entrée 
forcée de Dybala, qui n'a pu tenir que treize minutes avant de partir pleurer 
sur le banc et qui n'aura pu délivrer qu'un bon corner pour Cristiano Ronaldo. 
En achetant le Portugais, la Juventus rêvait de pouvoir enfin s'offrir la 
troisième C1 de son histoire mais a oublié de construire autour de lui. Une 
photo permet d'illustrer l'évolution du onze turinois. En 2
 015, la Juve a défié le Barça à Berlin avec l'un des milieux les plus joueurs 
d'Europe (Pirlo, Pogba, Marchisio, Vidal). Aujourd'hui, elle se bat en son cœur 
avec un milieu déséquilibré, vidé de sa créativité et qui a peiné à contenir 
les quelques décollages techniques de son homologue lyonnais. Un môme de 20 
piges, lui, a montré qu'il pouvait tout faire : gérer le rythme, intercepter, 
dribbler et offrir de la personnalité. Il s'appelle Maxence Caqueret et a rendu 
une feuille de match plus que propre : 3 tacles, 3 interceptions, 5 passes 
adverses bloquées, 4 dribbles réussis (deuxième meilleur dribbleur du match 
derrière Aouar), plus de 85% de passes réussies...
Ma cité va Caqueret

Jeff Reine a remis des glaçons

Sur le papier, le milieu Aouar-Caqueret-Guimaraes est très joueur et vendredi 
soir, face à une Juventus souvent incapable de récupérer le ballon et de le 
sortir proprement, ces trois hommes, notamment les deux premiers, ont pu 
combiner à plusieurs reprises (49 passes réussies par les Lyonnais dans le 
dernier tiers adverse en première période contre 26 pour la Juve) à l'intérieur 
du jeu et permettre à l'OL de passer du temps dans le camp adverse. Ce secteur 
de jeu est aussi l'axe de progression principal des Lyonnais, qui doivent mûrir 
dans la relation entre les centraux et les milieux. Comme face au PSG, l'OL a 
parfois rendu trop rapidement le ballon et sauté les lignes, ce qui peut 
s'expliquer par le fait que Dubois et Cornet peinent à sortir sous pression et 
à apporter de la profondeur aux sorties de balle lyonnaises. Problème : cela a 
donné quelques biscuits à la Juve en début de seconde période et a par exemple 
permis à Ronaldo de sortir sa baguette pour nett
 oyer la lucarne de Lopes à l'heure de jeu. C'est alors à cet instant que Rudi 
Garcia a aussi réussi son match en faisant entrer Jeff Reine-Adelaïde, qui a 
permis à l'OL de respirer en gagnant des mètres et en obtenant des fautes loin 
de son but. À un moment du match tendu pour les Lyonnais, le poumon de 
Rivière-Pilote a bu la pression et a amené énormément de personnalité alors 
qu'Aouar commençait à marquer le pas physiquement. Conséquence : l'OL a su 
résister, a été grand au moment où il a fallu être grand et a su tenir 
lorsqu'on l'imaginait tomber du fil sur lequel tenait ce huitième de finale 
retour. La Juve, elle, est tombée, déréglée, incapable d'amener le grain de 
folie nécessaire qui lui avait permis de retourner l'Atlético en mars 2019. 
Ronaldo ne peut tout faire tout seul et Sarri peut hurler qu'il n'a rien à « 
redire de la prestation » de ses hommes vendredi soir. La vérité est que ce 
match a été l'examen final pour lui d'une saison co
 mpliquée dans le jeu, durant laquelle la Vieille Dame s'en est souvent sortie 
grâce ses individualités mais sans réussir à faire exploser son bloc.



Lyon a réussi à passer grâce à son plan, mais aussi – et surtout ? - aux 
failles de la Juve : aucun débat là-dessus. Désormais, Garcia et sa bande vont 
filer à Lisbonne et y retrouver Manchester City, monstre qui admire Houssem 
Aouar et que l'OL va devoir affronter sans Maxwel Cornet. Ainsi, le technicien 
français va devoir redessiner une partie de sa défense et a une question devant 
lui : faut-il lancer dans le bain Melvin Bard ou faut-il décaler Marçal au 
risque de faire entrer dans le onze un Andersen qui ne rassure personne ? « Peu 
de gens nous pensaient capables de le faire, mais on l'a fait, savoure pour 
l'instant la mèche de l'OL. C'est une belle chose, mais il ne faut pas 
s'arrêter en si bon chemin. L'OL est en quarts de la C1. On ira en outsiders et 
ça nous ira très bien. » Il faudra surtout y aller sans peur, avec le jeu aux 
chevilles et en ayant effectué un gros boulot dans la gestion des transitions, 
au risque de se faire rafler sous les vagues. U
 n exploit, c'est bien. Construire dessus, c'est désormais l'enjeu.

Par Maxime Brigand 

Source So Foot : 
https://olplus.fr/piy3-
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