Geubbels, Maolida, Gouiri : L'OL a-t-il raison de ne plus faire confiance à ses
attaquants ?
ParMartin Mosnier
il y a 8 heures | Mis à jour il y a 8 heures
@MM_eurosportfr
LIGUE 1 – En deux ans, l'Olympique Lyonnais s'est séparé de ses trois plus gros
espoirs au poste d'attaquant : Willem Geubbels, Myziane Maolida et, désormais,
Amine Gouiri parti à Nice ce mercredi. Trois jeunes qui semblaient pourtant
incarner l'avenir de l'OL. Alors, Lyon a-t-il définitivement tiré une croix sur
ses jeunes ?
Il paraît que l'amour dure trois ans. A l'aube de la saison 2017/2018, Lyon
couve trois talents offensifs, trois individualités pleines de promesses, trois
références dans leur catégorie d'âge, trois jeunes de 16, 17 et 18 ans qui
incarnent, pense-t-on alors, l'avenir de l'OL : Willem Geubbels, Amine Gouiri
et Myziane Maolida. Trois ans plus tard, il n'en reste plus un seul. La lune de
miel a viré au fiasco. Aucun d'entre eux n'a réussi à s'inviter durablement
dans la rotation des septuples champions de France qui a fini par s'en séparer.
Chaque départ a soulevé interrogations et regrets chez les habitués du Groupama
Stadium.
Ligue 1
IL Y A 9 HEURES
Mais Lyon a rempli ses caisses : 37 millions d'euros pour un trio qui n'a pour
le moment rien prouver au plus haut niveau. Est-ce que Lyon a fait une affaire
? Est-ce que l'OL a complètement perdu la tête en manquant de patience ? Et ces
trois transferts signifient-ils qu'il n'y a plus de place pour la formation
lyonnaise chez les pros de l'OL ? L'OL et ses attaquants, c'est d'abord un
héritage, un savoir-faire : Bernard Lacombe, Ludovic Giuly, Hatem Ben Arfa,
Alassane Pléa, Fleury Di Nallo, Anthony Martial, Nabil Fekir, Alexandre
Lacazette et bien sûr, Karim Benzema.
Lacazette et Fekir (OL)
Crédit: AFP
Lyon sort des attaquants internationaux à la pelle. Une tradition qui nourrit
les espoirs autour de ceux qui fréquentent le centre de formation. Geubbels,
Maolida et Gouiri ont incarné, malgré eux, cette filiation parce
qu'aujourd'hui, tout va plus vite. Leur réputation flatteuse précédait leur
début chez les professionnels. Et, au fond, peu importe qu'ils n'aient jamais
percé à l'OL, les promesses semées chez les jeunes à Lyon et en sélection
couplées au savoir-faire lyonnais les ont très vite, sans doute trop, érigés
comme les successeurs de cette glorieuse lignée.
Trauma Martial et fantasme du nouveau Benzema
Voilà pourquoi chacun de leur départ a été vécu comme un douloureux épisode par
les supporters de l'OL biberonnés aux exploits d'attaquants made in OL. Le
traumatisme de 2013 n'a rien arrangé. Cet été-là pour sauver ses comptes, Lyon
vend Anthony Martial pour cinq petits millions d'euros à Monaco. Il sera
revendu pour dix fois plus cher (plus 30 millions de bonus) deux ans plus tard,
deviendra international et incontournable en Premier League. Voilà ce qu'ont
ravivé les ventes de Geubbels et Maolida en 2018, et celle de Gouiri
aujourd'hui. Entre le trauma Martial et le fantasme du nouveau Benzema, chacune
des ventes fut un crève-cœur. Parce qu'à Lyon, plus qu'ailleurs, le public a
besoin de s'identifier à son équipe, de se retrouver dans ses jeunes Gones.
Alors l'OL a-t-il perdu la tête ? "L'OL n'est pas forcément en cause, nous
confie Frédéric Guerra, agent historique de nombreux Lyonnais du cru (Grenier,
Balmont, Gonalons entre autres). On observe désormais de plus en plus
d'impatience chez ses jeunes et leur entourage. Ils veulent une place dans le
onze de plus en plus tôt et Lyon ne peut pas toujours leur offrir." Dès ses 16
ans, Geubbels a voulu quitter Lyon et lui a préféré le projet monégasque. L'OL
s'est aussi heurté à un phénomène nouveau : un marché des très jeunes
agressifs. Monaco a acheté une promesse avec l'espoir d'en tirer une énorme
plus-value. Refaire une culbute façon Martial en quelque sorte.
L'exception Aouar
Philippe Lamboley, agent de Martial et… Maolida, a une lecture bien différente.
Pour lui, Lyon a sa part de responsabilité dans le départ de ses meilleurs
éléments : "Lyon a recruté Terrier et même Cornet plutôt que de développer
Maolida, analyse-t-il. Le joueur a besoin d'un projet pour avancer, se sentir
bien." Ce qui est certain, c'est que l'espace s'est réduit pour les jeunes à
Lyon. "L'OL a sorti une grande génération avec Umtiti, Lacazette, Fekir,
Tolisso parce qu'il n'avait pas le choix : il fallait financer le stade, nous
indique un fin connaisseur du microcosme lyonnais. Aujourd'hui, Lyon a rempli
les caisses et les mêmes n'auraient pas percé dans l'effectif professionnel."
Houssem Aouar, Rayan Cherki et Maxence Caqueret sont aujourd'hui les seuls
représentants de l'excellence de la formation lyonnaise dans le groupe
professionnel. Si Aouar est absolument indiscutable, Cherki, malgré des
prestations souvent séduisantes, n'a joué que 6 matches de L1 et 15 minutes en
C1 et Caqueret, entré dans le groupe pro à l'été 2018, n'a joué que 9 matches
cette saison et a vu la concurrence s'affermir avec l'arrivée de Bruno
Guimaraes. Un seul titulaire, en plus d'Anthony Lopes au club depuis bien plus
longtemps : c'est peu pour le meilleur centre de formation de France. "Bien sûr
que les rapports ont changé entre le groupe professionnel et les jeunes, note
Gérard Bonneau, ancien patron du recrutement des jeunes Lyonnais. Avant les
entraîneurs connaissaient les jeunes de 16, 17 ans. Aujourd'hui, Rudi Garcia ne
va pas les voir s'entrainer."
Du fantasme… à la réalité
Lyon s'est aussi lancé dans le business lucratif de la post-formation qui a
permis de signer des affaires en or avec comme meilleurs exemples les reventes
de Tanguy Ndombele et Ferland Mendy l'an passé. Les arrivées de Maxwell Cornet
(Metz), Martin Terrier (Lille), Jean-Philippe Mateta (Châteauroux) ou, plus
récemment, de Tino Kadewere (Le Havre), ont ainsi pu boucher l'avenir des trois
hommes qui nous intéressent. A un autre poste, celui de défenseur, Pierre
Kalulu, grand espoir du centre, a fini par aller voir ailleurs lui aussi faute
de temps de jeu et face à la concurrence au poste d'arrière droit (Dubois,
Tete, Rafael).
Mais l'antériorité dont nous disposons sur les opérations Maolida et Geubbels
tend à prouver que l'OL ne s'est pour le moment pas trompé. Les deux hommes ont
été vendus pour 30 millions d'euros en 2018. En deux ans, le premier a joué 28
matches pour deux buts avec Nice, le second s'est contenté de 8 minutes en
Ligue 1. S'ils n'ont pas été épargnés par les blessures, si leur jeune âge ne
les condamne à rien, la mise en route est poussive et c'est pour le moment Lyon
qui touche le jackpot. Une situation qui rappelle qu'il ne suffit pas d'être
attaquant formé à l'OL pour réussir. Les carrières de Yanis Taffer et Farès
Bahlouli, qui ont eux-aussi soulevé de grands espoirs, sont de vrais
contre-exemples. Du fantasme à la réalité, l'écart est parfois immense.
Gouiri, un "crack" comme Pléa
La question du niveau réel du trio doit être posée : Geubbels, Maolida et
Gouiri n'ont-ils pas été survendus ? "A mon avis, on n'entendra pas parler de
Geubbels au très haut niveau", tranche Guerra. "S'il y a un crack, c'est
Gouiri, continue Bonneau. C'est lui qui empile les buts, c'est lui qui a le
profil le plus précieux. C'est le seul qui a des références au moment de son
départ. Mais à mon avis, il s'est blessé au plus mauvais moment." A l'été 2018,
une rupture des ligaments croisés du genou gauche le stoppe dans sa
progression. Depuis, Lyon a misé sur Toko-Ekambi, entre autres.
"Le cas de Gouiri, le plus talentueux des trois, me rappelle celui de Pléa dont
je gérais les intérêts à l'époque, continue Guerra. Il n'avait plus l'espace
pour progresser à l'OL. Et, comme Gouiri, il allait s'ennuyer en réserve et il
fallait s'inscrire dans un projet nouveau. L'OL n'a pas de regret à avoir parce
que s'il ne part pas, Plea ne devient jamais international. C'est pareil pour
Gouiri. Et puis, Lyon garde un gros pourcentage à la revente comme dans le
dossier Martial qui lui a permis de retomber un peu sur ses pattes. Croyez-moi,
l'OL se trompe rarement. Ses dirigeants ont le nez creux. Quand ils ont un
crack monumental, comme Karim Benzema, ils savent le conserver et lui faire de
la place…"
Source Eurosport :
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