Fair play for Planet, un label pour mettre le sport au vert
Par Agathe Beaujon
Les clubs de sports sont des entreprises comme les autres, avec une empreinte
environnementale non négligeable. Pour les encourager à s’engager dans une
transition, Julien Pierre a créé mi-novembre 2020 le label Fair Play for
Planet. L’Olympique lyonnais devient ce jeudi le premier club de Ligue 1 à
signer pour faire certifier son action green.
Un comble pour le meilleur ennemi des verts stéphanois. L’Olympique lyonnais
(OL) affiche son côté green et devient ce 28 janvier le premier club de foot de
ligue 1 à signer avec le label Fair play for planet, lancé par l’ancien
rugbyman Julien Pierre, pour faire certifier son engagement pour
l’environnement.
Parce que le sport aussi a une (grosse) empreinte environnementale: 2 millions
de tonnes de gaz à effet de serre sont produite lors d’une seule coupe du monde
de foot par exemple, selon les chiffres de la FIFA. L’équivalent des émissions
de 2 millions de vols Paris-New-York pour une personne... Une manifestation
sportive de 5.000 personnes génère quant à elle 2,5 tonnes de déchets. Autant
que les déchets produits par un Français pendant plus de quatre ans.
A l’arrêt de sa carrière de rugbyman professionnel, Julien Pierre a donc décidé
de prendre le problème à bras le corps, de reprendre des études en école de
commerce et de construire un label, Fair play for planet. Résultat: un
référentiel construit avec l'Ademe, capable d’évaluer très concrètement
l’action des clubs et des évènements en matière gestion des sols, d’achats,
d’énergie, de bâtiments, de transports, d’alimentation, d’exemplarité, d’impact
sur le territoire…
Pour décrocher ce précieux sésame vert, les clubs doivent donc d'abord remplir
un questionnaire de plus de 300 questions. Le label mandate ensuite une
entreprise Cofrac (organisme de référence en matière d'accréditation) pour se
rendre sur place, comprendre l’écosystème et vérifier le déclaratif. Fair Play
for Planet produit alors un rapport, une notation avec trois niveaux de label
différents, et surtout des axes d’amélioration. Pour un coût minimum de 6.500
euros, variable selon la taille du club, le label est valable deux ans, date à
laquelle un nouvel audit sera réalisé.
Exemplarité du sport
L’occasion pour les clubs de communiquer sur leur engagement green, mais aussi
de répondre à une demande des supporters, estime Julien Pierre: "des études sur
les clubs de foot anglais ont par exemple montré que 80% des supporters
demandent à leur club de s’engager sur des sujets sociétaux. Demain, un club
vert ne sera pas plus supporté qu’un autre, mais il pourra potentiellement
attirer de nouveaux partenaires qui voudront communiquer leur engagement en
faveur de l’environnement. Sans parler des collectivités, très intéressées par
une transition du sport."
L’ancien international de rugby veut croire dans la notion d’exemplarité des
clubs de sport, tout comme l’Ademe. "Ce type de référentiel basé sur la
pédagogie peut amener à réduire son propre impact environnemental, mais aussi
être vecteur de sensibilisation, notamment auprès d’un public jeune et donc
réceptif", considère Nadia Boeglin, directrice de la Transition écologique des
Grands comptes.
De quoi convaincre l'Ademe d’apposer son sceaux sur le label, en gage de
sérieux. Et l’OL de se s’engager dans le processus, premier club de foot de
Ligue 1, après les Tigres Vendéens Etoile Chaumoise 85 des Sables d’Olonne et
la section paloise, club de rugby à XV où travaille Julien Pierre.
"Ce label est construit pour le sport, adapté à nos problématiques, il est
arrivé au moment où nous cherchions à évaluer l’action environnementale de
l’OL, à nous confronter à un regard extérieur", raconte Maëlle Trarieux,
responsable de la direction RSE du groupe OL. Une volonté soutenue par le très
emblématique président, Jean-Michel Aulas, déjà parrain de Time for the planet
qui finance des entreprises de lutte contre le changement climatique. Il se
murmure aussi que l’arrivée de ses petits-enfants aurait encouragé le PDG du
groupe à s’engager davantage pour l’avenir de leur planète...
Infrastructures
L’OL a la chance d’être propriétaire de ses murs, une exception française qui
lui donne la souplesse de mettre en place plusieurs projets verts, comme un
centre de tri des déchets au sous-sol, un système de récupération d’eau de
pluie pour la pelouse, de la géothermie, des espaces verts zéro produits
phytosanitaires, un parking vélo ou encore bientôt l’installation de panneaux
solaires, en collaboration avec des partenaires comme Engie ou Veolia.
"Contrairement aux autres clubs, nous sommes propriétaires du stade, et nous
savons que l’empreinte environnementale dépend beaucoup des infrastructures",
appuie Maëlle Trarieux, confiante quant aux résultats de l’audit. "J’ai du mal
à croire que nous n’atteignions pas au moins le premier niveau du label, nous
ne partons pas d’une page blanche et l’objectif est d’être dans une
amélioration continue", assure la responsable RSE, assurant que l’engagement du
club précède largement l’arrivée d'Europ
e Ecologie les Verts à la tête de Lyon et de sa Métropole.
Anticipant les axes d'amélioration, l’OL dit également travailler sur
l’alimentation de ses salariés et du grand public au stade. Comme le recommande
l’Ademe, le groupe pourrait notamment diminuer la viande dans les menus du
restaurant d’entreprise et toujours mieux sourcer ses produits. Quant aux
équipements, les gones y travaillent mais se sont toutefois quelque peu cassé
les dents sur la création d’un maillot local... finalement beaucoup trop cher à
produire.
Transports
Reste la question du transport des joueurs et joueuses, comme des supporters,
qui représentent plus de 70% de l’impact d’un événement sportif estime l’Ademe.
L’OL collabore déjà avec les transports en commun locaux pour desservir son
stade en navette les soirs de match, auxquelles va s’ajouter une liaison
quotidienne en tramway. Mais le club aimerait aussi encourager les cyclistes.
"Le stade est relié au cœur de Lyon par des pistes cyclables, nous avons un
parking de 500 places, nous voulons montrer que le trajet est possible à vélo,
sécurisé et agréable", souligne Maëlle Trarieux. L’Ademe propose elle aussi des
initiatives concrètes, comme d'offrir une réduction en billetterie aux
supporters prenant les transports en commun, d'organiser des bus ou des trains
de supporters pour les matchs à l’extérieur, de mettre en place un site de
covoiturage pour le public ou les jeunes en formation…
Difficile en revanche de se priver de l’avion pour les joueurs estime l’OL: le
train poserait trop de problèmes de sécurité des athlètes, et le bus n’est
possible que pour des trajets assez courts… d’autant que le premier sponsor du
club n’est autre que Fly Emirates, une compagnie aérienne. “Nous ne sommes pas
dans le militantisme, argumente Maëlle Trarieux. L’aviation est aussi un
secteur en train de se réinventer, nous sommes dans une démarche d’échange avec
nos partenaires”, promet la responsable RSE. L’environnement comme critère de
sélection des sponsors n’est donc pas encore d’actualité pour le club.
L'espoir de Julien Pierre: que l’engagement de l’OL fasse boule de neige dans
le secteur. "Cette signature est une étape importante pour notre label." Il dit
aussi discuter avec "beaucoup" d’autres clubs et évènements de toute taille (y
compris les JO 2024), pour créer un élan positif dans le sport. Mais la partie
est encore loin d’être gagnée alors que l’UEFA vient de confirmer
l’organisation du prochain Euro de foot sur 12 villes à travers l’Europe…
"Aberrant", souffle Julien Pierre.
Source Challenges :
https://olplus.fr/mFkum
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