Diacre vs joueuses de l’OL : récit d’une guerre froide devenue ouverte
par Johan Paravy
La guerre est définitivement déclarée entre les joueuses de l’OL et Corinne
Diacre.
Si l’entente n’a jamais semblé au beau fixe entre la sélectionneuse de l’équipe
de France et plusieurs cadres lyonnaises, les tensions se sont progressivement
intensifiées ces derniers mois. Retour sur les étapes d’un conflit qui secoue
actuellement les Bleues.
Le retrait du brassard à Wendie Renard
Capitaine irréprochable des Bleues depuis 2013, la défenseure de l’OL s’est vue
retirer le brassard quelques semaines après l’arrivée de Corinne Diacre à la
tête de l’équipe de France en août 2017. Cette dernière expliquait à l’époque
vouloir que Wendie Renard se reconcentre sur son jeu individuel, lui reprochant
de trop penser aux autres. Une décision que la Martiniquaise n’avait pas
vraiment appréciée. “Quand un nouvel entraîneur arrive. Il peut changer. Mais
on est des êtres humains, il faut respecter ce qui s’est passé. Il y a des
formes à prendre […] J’ai eu une éducation, le respect en fait partie », avait
lancé la joueuse.
Les critiques ouvertes après la Coupe du Monde
Le conflit a franchi une nouvelle étape à la fin de la Coupe du Monde 2019
(élimination des Bleues en quart de finale). Quelques jours après
l’élimination, Corinne Diacre s’en était prise ouvertement aux joueuses
lyonnaises, suggérant un manque de gestion dans la préparation du Mondial. « La
saison de Lyon a été très longue. On a dû gérer les organismes. Certaines
d’entre elles se sont même blessées pendant la préparation. Il faut faire avec.
Est-ce que toutes ces joueuses ont fait le maximum pour optimiser les temps de
récupération ? Il faut que tout le monde se pose les bonnes questions », avait
déclaré la sélectionneuse dans Le Parisien.
Corinne Diacre avait également fustigé Eugénie Le Sommer (2 buts inscrits dans
le Mondial) dans un entretien accordé à Téléfoot, en lui reprochant notamment
son positionnement : « Eugénie, ça fait 20 mois qu’elle joue à gauche avec moi.
Si on regarde tous les matchs de préparation, elle n’a jamais joué dans l’axe
avec moi. Et quand elle a joué dans l’axe avec son club, on ne peut pas dire
que c’est là où elle a été la plus performante […] Même moi, je lui ai dit :
‘pourquoi tu restes à gauche?’ L’idée et notre projet de jeu, ce n’était pas
ça. Sauf que c’est ce qu’elle a fait. Pour quelle raison? Je pense qu’on en
discutera plus tard. »
Des déclarations qui lui avaient attiré les foudres de l’entraîneur des
Fenottes de l’époque, Raynald Pedros.
Le ras-le-bol de Sarah Bouhaddi
La nouvelle a fait l’effet d’un coup de tonnerre cet été. La gardienne
historique de l’équipe de France, Sarah Bouhaddi annonçait faire une pause avec
les Bleues dans une interview accordée au site Olympique-et-Lyonnais. Si les
raisons n’étaient pas explicitement évoquées par la joueuse, l’ombre de la
mésentente avec Corinne Diacre était perceptible. Ce qui a été confirmé le mois
dernier, lors d’une conférence de presse, la sélectionneuse confirmant que
Sarah Bouhaddi lui avait signifié ne plus vouloir venir en équipe de France
tant qu’elle sera sur le banc.
« J’ai entendu ses propos, elle me l’avait effectivement signifié. Je pense
avoir tenu compte de sa décision en ne la sélectionnant pas. Il est difficile
aujourd’hui de sélectionner quelqu’un qui n’a pas envie de porter le maillot
bleu. Elle a exprimé que, visiblement, j’étais la cause de sa volonté de ne
plus venir en équipe de France. Maintenant, l’équipe de France n’appartient à
personne, ni aux joueuses ni à la sélectionneuse », avait assuré Corinne Diacre.
La non-sélection d’Amandine Henry
Si les tensions étaient palpables, la prolongation de Corinne Diacre jusqu’à
l’Euro 2022, associée à la dernière non-sélection d’Amandine Henry pour le
prochain rassemblement des Bleues, cristallisent aujourd’hui une forme de point
de non-retour. Car s’il restait relativement sourd jusqu’à maintenant, le
conflit est désormais totalement ouvert entre la sélectionneuse et les joueuses
de l’OL. Après la victoire des Fenottes face à Guingamp vendredi soir en
championnat – durant laquelle Amandine Henry a marqué et envoyé un message
clair à Corinne Diacre – elles sont plusieurs Lyonnaises à avoir pris la parole
pour évoquer leur mal-être.
« Il faut essayer d’amener un peu plus de sérénité et d’énergie positive pour
pouvoir s’exprimer complètement sur le terrain. L’atmosphère n’est pas bonne.
L’image qu’on dégage en Europe et dans le monde n’est pas celle que l’équipe de
France doit avoir. C’est important d’être serein, d’avoir de la confiance.
C’est difficile […] On a rencontré le président de la FFF Noël Le Graët cette
semaine. On a eu des échanges par rapport à la vision de l’équipe de France. On
a un Euro à préparer. Les échanges n’ont pas été très longs mais ils ont été
importants pour pouvoir avancer ensemble. Dans une entreprise, si on arrive
tous les matins et qu’on a eu des désaccords avec le patron, on n’est pas
serein, on n’est pas calme. Il faut que tout le monde soit clair. Ça ne peut
pas continuer, on se fait du mal entre nous », s’est confiée Wendie Renard sur
Canal+.
« C’est vrai que ce n’est pas compréhensible parce qu’aujourd’hui, Amandine
Henry, ça reste quand même la capitaine de l’équipe de France, et des mauvaises
prestations on en a toutes faites. Ce n’est pas cohérent mais voilà, on ne va
pas se mentir, ça se voit… Demain, si Hugo Lloris fait des mauvaises
prestations, je pense qu’il retourne en sélection. Elle a démontré tout le
contraire ce soir, que c’est une fille sur qui on peut compter en équipe de
France et dont on a fortement besoin« , a déclaré de son côté Amel Majri.
Le push enclenché ?
Alors qu’il y a urgence, la situation va-t-elle pouvoir se décanter ? Rien
n’est moins sûr. Car en se mettant les joueuses de l’OL à dos, c’est de la
majeure partie de son effectif que Corinne Diacre s’est coupée. Elle devra
inévitablement mettre de l’eau dans son vin pour que les choses s’arrangent, ce
qui ne semble visiblement pas être dans son caractère. Il est par ailleurs
important de préciser que les désaccords n’existent pas seulement avec les
joueuses lyonnaises. La capitaine du Paris FC, Gaëtane Thinet, avait également
mis en lumière les failles de la « méthode Diacre » au mois de février dernier.
Une chose est certaine, la Fédération a aussi une part de responsabilité en
décidant de lui offrir une prolongation sans avoir cherché à régler au
préalable les conflits internes. Il n’est pas sûr que les choses auraient été
gérées de la même manière si ce genre de problème s’était présenté chez les
garçons. Un fiasco que l’instance doit maintenant assumer en prenant des
décisions fortes, car il y a désormais le feu chez les Bleues.
Source Lyon Sports Actu :
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