Wendie Renard : « chaque fois que je mets mes crampons, c’est pour gagner ! »
Propos recueillis par Fxg, à Paris
Wendie Renard est née le 20 juillet 1990 à Schœlcher en Martinique. Elle évolue
au poste de défenseuse droite ou centre à l'Olympique lyonnais. Elle a remporté
avec son club, l’Olympique lyonnais, quatorze Championnats de France, neuf
Coupes de France, un Trophée des championnes ainsi que la Ligue des champions
en 2011, 2012, 2016, 2017, 2018, 2019 et 2020. Rencontre.
France-Antilles : Le foot professionnel, comment ça a commencé pour vous ?
J’ai commencé le foot à 7 ans, mais je suis arrivée en métropole à 16 ans, donc
le foot professionnel, on va dire que ça fait quatorze ans que j’en fais. Vous
savez, je frappais déjà des pieds dans le ventre de ma mère ! Après, quand j’ai
vécu à la cité Conquête au Prêcheur, j’étais entourée de gars qui jouaient tout
le temps au foot ! Naturellement, j’ai joué au foot. J’ai toujours été attirée
par le ballon rond, les voitures télécommandées, tout ce qui était pour les
garçons… J’étais un garçon manqué.
Vous imaginiez-vous enfant que vous seriez considérée comme la meilleure
défenseure au monde et l'une des meilleures joueuses du monde ?
On ne s’imagine pas à ce point-là, mais on a forcément des rêves en étant
petite… Moi, c’est sûr que je voulais vivre de ça. A l’école, quand on me
demandait ce que je voudrais faire plus tard, j’écrivais « footballeuse
professionnelle » alors que ça n’existait même pas. Même la maîtresse m’a dit
un jour : « Non, Wendie, faut que tu changes, que tu choisisses un vrai métier
! » J’ai persisté : « Non, non, c’est ça que je veux faire ! » Et j’ai remis ce
qu’elle avait barré ! Voilà, depuis mes 8 ans, j’ai dit à ma mère qu’un jour
elle me verrait sous le maillot bleu. Ca pouvait sembler des paroles en l’air,
mais j’ai toujours été assez déterminée. Je ne ratais pas un seul entraînement.
Pareil quand j’ai intégré l’équipe des filles et même avant, au François…
Qu’est-ce que vous faisiez au François ?
Le François, c’était un peu comme le centre de formation de Clairefontaine. La
semaine, je m’y entraînais avec les garçons. Jocelyn Germé qui était le CTR de
la Martinique, s’est battu parce que c’était la première fois qu’ils
acceptaient de faire entrer une fille ! J’y suis entrée avec une autre fille,
une métropolitaine qu’ils avaient fait venir pour qu’on s’entraîne ensemble,
mais après deux mois, elle n’est pas restée. Mais c’est la première fille qui a
permis à d’autres filles de jouer avec les garçons.
« Il fallait qu'on soit présentes »
Cette saison s’est encore achevée par la victoire de votre équipe au
championnat, en coupe de France, au Tournoi de France par équipes féminines, au
trophée Véolia féminin et à la ligue des champions. Qu’avez-vous ressenti ?
Beaucoup d’émotion ! C’est une année un peu particulière. Tous ces titres
resteront gravés parce qu’on a été championnes alors même que le championnat
n’était pas achevé ! Après on a eu la chance de gagner la coupe de France et la
ligue des champions. On est parties la chercher collectivement dans des
conditions difficiles. Il fallait qu’on soit présentes sachant qu’on était
tenantes du titre et l’équipe à battre ! Ce n’était pas facile, mais on l’a
fait ! Je retiendrai une belle année, même si elle a été particulière avec le
COVID !
Comment expliquez-vous votre longue histoire avec Lyon ?
C’est une belle histoire parce que je n’ai pas été reprise à Clairefontaine et
parce que Jocelyn Germé s’est battu pour moi. Il a appelé un jeune gardien
martiniquais qui habitait Lyon et c’est comme ça que Lyon m’a permis d’avoir ma
deuxième chance ! C’est marrant parce que quand je jouais en Martinique, je
supportais deux équipes : Paris parce qu’il y avait Ronaldinho dans les rangs
du PSG, et Lyon parce que dans les années 2000, ils ont tout raflé avec
beaucoup d’Antillais dans leur équipe. C’est vrai que quand je suis arrivée à
Lyon, j’ai senti quelque chose de différent, que c’était le moment ou jamais…
La footballeuse ne lâche rien sur le terrain. -
Ca fait quatorze ans que ça dure votre histoire avec l’OL… Pour rien au monde,
vous ne partiriez ?
Non, mais je n’ai pas fermé la porte pour voir ce qu’il se passe notamment à
l’étranger… En foot féminin, disons depuis cinq ans, il y a des clubs qui
commencent à investir, à se structurer… Moi, j’ai eu cette chance d’avoir un
président qui a cru en une section féminine et qui a investi chaque année de
l’argent. Au début, c’était de sa poche, mais aujourd’hui, on a rapporté des
titres, on a nos sponsors et la section se développe. Mais c’est compliqué de
dire qu’on va aller voir ailleurs quand vous savez que professionnellement,
c’est encore peu structuré même si aujourd’hui, il y a plus d’équipes… Donc
pourquoi pas ? Mais en tout pour moi c’est sûr, ce sera à l’étranger ! En
Italie, il y a la Juve, la Roma, et aux Etats-Unis, en Angleterre, en Espagne,
beaucoup d’équipes se structurent.
« En France, on a encore du chemin ! »
Les femmes sont-elles aussi bien traitées que les hommes ?
Je pense qu’en France, on a encore du chemin. Je suis arrivée très jeune donc
je vois l’évolution. Quand on discute avec les footballeuses étrangères qui
jouent à l’Olympique lyonnais, on s’aperçoit qu’on avait un peu d’avance, mais
que cette avance commence à se réduire. Il y a même des pays qui passent devant
nous ! Regardez l’Espagne : Toutes les équipes féminines, la D1 comme la ligue
2, vont passer professionnelles cette année ou l’année prochaine. Des filles se
sont battues pour ça !
Quels sont vos objectifs aujourd’hui ?
Je veux marquer l’histoire de mon empreinte, je veux laisser mon nom, le nom de
mon papa gravé, mais je veux aussi le faire de manière collective. J’ai fait
6000 km de trajet donc j’ai envie de laisser 6000 fois mon nom quelque part !
Qu’aimez-vous faire quand vous ne jouez pas au foot ?
J’aime bien me reposer ! Je suis casanière. Plus je suis chez moi et mieux je
me porte. Après, j’ai des hobbies comme tout le monde, me faire un petit ciné
de temps en temps, un petit restau, manger en famille… Je dis toujours que mon
corps, c’est mon outil de travail donc quand j’ai du repos, ce n’est pas pour
aller prendre l’avion, faire du shopping, c’est pour rester chez moi, me
reposer et prendre soin de ma maison.
Wendie Renard, en 2019, à l'aéroport Aimé-Césaire. -
« Je sais que les Martiniquais sont derrière moi »
Quelle relation avez-vous gardé avec la Martinique ?
J’y vais souvent, minimum une fois par an, en décembre ou pour les grandes
vacances… Ca dépend des programmes de compétition ! Je suis fière d’être
Antillaise et Martiniquais et partout où je passe, mes origines sont avec moi !
Si vous saviez, quand j’ai marqué contre le PSG, le nombre de messages que j’ai
reçus, famille, amis ou anonymes… Il y a une ferveur populaire et je sais que
les Martiniquais sont derrière moi, que la plupart sont fiers de voir mon
parcours. Je suis Française, mais je sais d’où je viens et le chemin a été
difficile !
Avez-vous des projets pour le foot en Martinique ?
C’est dans mes projets ! On a énormément de qualités au pays, mais tout est
question de moyens et de structures. J’aimerai faire des choses pour les jeunes
parce qu’ils sont la base ! Si demain, on veut avoir de la qualité, il faut
s’appuyer sur cette jeunesse. Je travaille déjà sur mes projets, mais je ne
suis pas encore au pays pour mettre en place des choses…
Comment envisagez-vous cette nouvelle saison ?
Tout gagner ! Ca fait quatorze ans qu’on gagne le championnat, neuf fois la
Coupe de France, sept fois la ligue des champions…
On vous attend au tournant !
Vous pouvez dire tout le monde nous attend ! On connaît déjà le titre des
journaux en cas de défaite ! Pour nous, c’est motivant, parce qu’on le sait. On
sait qu’on est l’équipe à abattre, ça nous demande encore plus aux
entraînements pour être au niveau ! Ça veut dire qu’on a toujours soif ! Chaque
fois que je mets mes crampons, c’est pour gagner ! On n’oublie jamais que tout
le monde est à 10 000 % contre nous et nous, on est obligées, on n’a pas le
droit à l’erreur et chaque week-end, on essaie de se mettre au niveau et de
tout faire pour gagner.
Quel conseil donneriez-vous aux jeunes Martiniquaises ?
Tout simplement de croire en elles, en leur potentiel ! J’étais déterminée,
assidue quand j’ai commencé le foot, je savais où je voulais aller. Mon
message, c’est travailler et rester sérieuse. Il ne suffit pas d’être détectée
par un club, mais dès le début, il faut savoir ce que le petit garçon ou la
petite fille veut et lui donner les moyens d’y parvenir ! Même si on a de la
qualité — à part Messi aujourd’hui qui peut rester un an sans jouer au foot et
revenir et faire mal à tout le monde — il faut travailler, se donner les moyens
d’atteindre ses objectifs, ses rêves… Parce tout est possible !
Source France-Antilles Martinique :
https://olplus.fr/TKTOU
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